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frères Goncourt

LES FRÈRES GONCOURT

 / Les frères Goncourt, gravé par A.Descaves /

Deux frères, un seul prénom : Juledmond

Tout ce qui comptait dans les lettres pendant la deuxième moitié du XIXe siècle fréquenta Jules (1830-1870) et Edmond de Goncourt (1822-1896). Certains écrivains subirent l'influence du style «artiste» prôné par les Goncourt. En particulier Jean Lorrain dont on pourrait dire qu'il a été leur pasticheur et J.-K. Huysmans. Pierre Loti fut attaché à cette esthétique et c'est du Grenier que sera lancée sa candidature à l'Académie française comme une sorte de plaisanterie contre la littérature officielle. Toujours est-il que rien ne flattait plus Edmond de Goncourt que de s'entendre dire qu'il avait usé sa vie d'artiste à tenter l'expression de l'inexprimable, à rendre ce qui ne saurait être rendu, et qu'il appelait dans son jargon: l'irrendable.

Dans leur affection mutuelle, étrange cas de «gémellité littéraire», les deux frères, d'une sensibilité presque maladive, avaient forgé un prénom collectif: Juledmond. Jules était le véritable écrivain, comme le souligne Edmond (Journal du 26 décembre 1895): «Le soin amoureux qu'il mettait à l'élaboration de la forme, à la ciselure des phrases, au choix des mots, reprenant des morceaux écrits en commun et qui nous avaient satisfaits tout d'abord, les retravaillant des heures....» Après la mort prématurée de Jules, leur Journal sera poursuivi par Edmond qui continuera d'associer la mémoire de son frère à toutes ses activités. Surtout féru de peinture, il se révélera un exceptionnel collectionneur. C'était une passion qu'il tenait de son grand-père Huot de Goncourt qui siégea à l'Assemblée Nationale et de sa mère habituée à chiner le dimanche les antiquaires du Faubourg Saint-Antoine. Il fut le découvreur de l'art japonais, et il réhabilita le XVIIIe dans le goût français.

princip oeuvres

Les principales œuvres des frères Goncourt

1853 La Lorette
1854 Histoire de la société française pendant la Révolution.
1855 Histoire de la société française pendant le Directoire.
1858 Portraits intimes du XVIIIe siècle.
1858 Histoire de Marie-Antoinette.
1859 L'Art du XVIIIe siècle.
1860 Les maîtresses de Louis XV.
1861 Soeur Philomène.
1862 La Femme au XVIIIe siècle.
1864 Renée Mauperin.
1865 Germinie Lacerteux.
1866 Henriette Maréchal.
1867 Manette Salomon.
1869 Madame Gervaisais.
1877 La Fille Elisa.
1882 La Faustin.
1884 Chérie.
1887 Journal, les trois premiers volumes.
1890 Journal, Tome IV.
1891 Journal, Tome V.
1892 Journal, Tome VI.
1894-1896 Journal, Tome VII, VIII et IX.

 / Le grenier, la maison des Goncourt à Auteuil, mai 1886 /

journal des goncourts

Le journal des Goncourt toujours réédité

De l'oeuvre littéraire des frères Goncourt, abondante, il reste essentiellement le Journal qui a été plusieurs fois réédité, notamment chez Robert Laffont en 1989 (collection «Bouquins»). Le succès de cette édition intégrale a entrainé la réédition de plusieurs des ouvrages littéraires et historiques des Goncourt. Citons, en particulier, le roman Germinie Lacerteux (1865) qui relate les tristes aventures d'une servante hystérique. Emile Zola, un de leurs lecteurs assidus, fera ce commentaire: «Ils ont des nerfs d'une délicatesse excessive qui décuplent les moindres impressions».

La rédaction de leur Journal, dont les premières pages furent écrites au lendemain du coup d'Etat du 2 décembre 1851, assurera la postérité des Goncourt. Car les deux frères, surtout Edmond qui en a écrit les trois quarts, seront sans complaisance envers leurs contemporains mis à nu. Leurs remarques sont de véritables pointes sèches exécutées de main de maître. Après la mort de Jules, Edmond, qui se révélera un extraordinaire reporter sur la société de son temps, décida d'en publier une partie. Neuf volumes parurent entre 1887 et 1896. L'Académie Goncourt qui avait la charge, par testament, de publier l'intégralité du manuscrit, proposera en 1935 une édition tronquée préfacée par Lucien Descaves. Une autre le fut par André Billy.

Au risque de procès en diffamation, il était encore trop tôt pour dévoiler la totalité de ce précieux document qui témoigne, sans fausse pudeur, de la vie artistique et mondaine de la deuxième moitié du XIXe siècle. Le pastiche du Journal des Goncourt par Marcel Proust dans La Recherche du Temps Perdu est sans doute le plus bel hommage rendu aux deux frères.

Le grenier d'Auteuil, "parlotte" littéraire du dimanche

Au printemps 1868, chassés par le bruit de la rue Saint Georges, Edmond et Jules de Goncourt quittent leur appartement pour s'installer dans un petit hôtel particulier d'Auteuil. C'est à cette adresse, 53 boulevard de Montmorency, qu'ils espèrent trouver le calme au milieu de leurs œuvres d'art, notamment des bronzes japonais et des porcelaines de Chine. La proximité d'une voie ferrée les oblige à faire d'importants travaux qui dureront plusieurs mois. Après le décès de Jules le 20 juin 1870, Edmond envisage de louer la maison qui pendant le siège de Paris sera touchée par un petit obus, l'un des derniers tirés par les Versaillais.

A l'automne 1884, Edmond de Goncourt décide d'ouvrir à ses amis le Grenier, ce qui avait été aussi le vœu de son frère. Il note dans le Journal: «Le haut de ma maison, je le bouscule et jette à bas les cloisons et cherche à faire des trois pièces du second sur le jardin une espèce d'atelier sans baie pour y installer, à la sollicitation de mes amis de la littérature, une «parlote» littéraire le dimanche.» Parmi les nombreux écrivains admis à fréquenter le Grenier on retrouvera les «dix hommes de lettres de talent» qui vont former la première académie. Chacun bénéficiera d'une rente viagère de 6000 francs grâce à la vente aux enchères de la collection Goncourt dispersée à l'Hôtel Drouot quelques mois après la mort d'Edmond, le 16 juillet 1896, à Champrosay, en bordure de la forêt de Sénart, chez Julia et Alphonse Daudet. Ce dernier en tant qu'exécuteur testamentaire d'Edmond de Goncourt, avait la charge de constituer la future académie.

Aujourd'hui, l'Hôtel particulier est propriété de la Ville de Paris.

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